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La restriction de l'usage de l'eau dans 50 communes bretonnes résulte d'une pollution occasionée par une installation de méthanisation. Un événement qui interroge sur le fort développement de la filière et les risques qu'il comporte.

Mercredi 19 août, le préfet du Finistère prenait un arrêté de restriction d'usage de l'eau pour 50 communes en raison d'une pollution à l'ammoniaque. La préfecture a réduit le périmètre de la restriction à 41 communes jeudi 20 août, certaines collectivités disposant d'un circuit d'approvisionnement isolé ne dépendant pas de l'usine de production d'eau potable impactée par la pollution. « Il est recommandé de ne pas utiliser l'eau du robinet pour la boisson et le lavage des légumes et des fruits consommés crus. Elle peut toutefois être utilisée pour les autres besoins sanitaires et pour la cuisson des aliments. L'eau portée à ébullition peut être consommée », prévient la préfecture.

L'origine de cette pollution ? Le déversement, deux jours plus tôt, de 400 m3 de digestats de méthanisation dans un bassin d'orage, puis dans l'Aulne, par l'installation de méthanisation Kastellin située à Châteaulin, révèle l'association Eau & rivières de Bretagne. « L'entreprise a alerté les autorités qui ont tenté de diluer la pollution par l'augmentation du soutien d'étiage au départ du lac Saint-Michel. Faute de résultats satisfaisants à l'usine de production d'eau potable de Coatigrac'h, la préfecture a dû se résoudre à prendre un arrêté de restriction d'usage de l'eau potable », explique l'association de protection de l'environnement.

Valoriser 30 000 tonnes de déchets organiques

L'établissement à l'origine de la pollution est une installation classée (ICPE) exploitée par le producteur d'énergie Vol-V Biomasse. Soumise au régime de l'autorisation, elle relève de la directive sur les émissions industrielles (directive IED) qui vise les installations les plus polluantes en Europe. Il s'agit du premier site d'injection de biométhane dans le réseau GRTgaz en Bretagne, indiquait l'Ademe lors de son inauguration en mai 2018. L'agence de la transition écologique, qui a financé le projet avec l'agence de l'eau et le conseil départemental, le cite parmi les opérations exemplaires du plan de développement de la méthanisation dans la région.

Lors de l'inauguration, l'exploitant a annoncé un objectif de production de 22 gigawattheures par an de biométhane, soit l'équivalent de la consommation de la population de Châteaulin (plus de 5 000 habitants). La centrale, ajoutait-il, est dimensionnée pour valoriser environ 30 000 tonnes de déchets et matières organiques par an, dont 60 % d'origine agricole et 35 % industrielle. Outre le biométhane, la société annonçait la valorisation agricole, sous forme solide ou liquide, du digestat produit. « La forme liquide par sa concentration en azote ammoniacale offre la possibilité de se substituer aux engrais chimiques. Les exploitants agricoles peuvent ainsi (…) [optimiser] la fertilisation avec un produit complet et analysé avant chaque campagne d'épandage », vantait la société dans son dossier de presse.

Plainte contre l'exploitant

Mais ce qui apparaît exemplaire en termes d'économie circulaire et de développement des énergies renouvelables (EnR) peut ne pas l'être en termes de nuisances. « Comment se fait-il qu'une entreprise, dont l'étude des dangers a été présentée à l'enquête publique en septembre 2018, puisse générer un tel accident, sinon à penser que les risques industriels de ces installations de méthanisation sont largement minimisés ? », s'étonne Jean Hascoet, délégué territorial d'Eau et Rivières de Bretagne (ERB). L'ONG ne comprend pas comment une telle quantité de digestats a pu déborder sans alarme et sans bassin de rétention prévus.

L'association annonce le dépôt d'une plainte contre l'exploitant. Elle réclame également un moratoire sur la création de nouvelles unités de méthanisation industrielle en Bretagne. Pour les associations de la Fédération Bretagne Nature Environnement, la méthanisation « soutient, voire développe, un modèle agricole intensif, contraire à l'agroécologie et destructeur de l'environnement ». Parmi les griefs formulés contre le développement de cette filière :  les incertitudes sur l'impact des digestats épandus, les concentration d'azote et de phosphore sur les territoires, les émanations et fuites de gaz, mais aussi… les pollutions accidentelles de cours d'eau.

« Cet événement (…) est également révélateur de la fragilité de notre modèle d'approvisionnement en eau », pointe ERB. L'association déplore l'abandon, ces quarante dernières années, de centaines de petits captages communaux et le recours à des interconnexions qui « éloignent toujours plus le consommateur de la ressource ». Résultat ? En cas d'accident de ce type, « ce modèle ne laisse alors aucune alternative qu'une restriction d'usage pour des milliers de consommateurs ».

accord de l'Éditeur ou établissement d'un lien préformaté [35978] / utilisation du flux d'actualité.

Tag(s) : #Ecologie, #Environnement, #Santé
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