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Un préfet ne peut pas ordonner la destruction d'espèces sans motiver sa décision. C'est ce que vient d'apprendre à ses dépens le représentant de l'État dans les Côtes-d'Armor. Par un jugement du 9 décembre 2021, le tribunal administratif de Rennes a en effet annulé, à la demande de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO), l'arrêté préfectoral du 2 janvier 2020 qui autorisait la destruction et l'effarouchement de 8 000 choucas des tours. Une espèce protégée à laquelle la fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles des Côtes-d'Armor (FDSEA 22) souhaitait porter atteinte du fait des dommages constatés sur les cultures.

Le préfet avait justifié cette autorisation en indiquant que les corvidés étaient susceptibles de « provoquer des dégâts à toutes les branches de l'activité agricole du département tout au long de l'année » et qu'il était nécessaire d' « apporter une réponse proportionnée à la perte économique de ces activités ». Pour déroger à l'interdiction de destruction des espèces protégées, le Code de l'environnement impose trois conditions cumulatives : absence de solution alternative satisfaisante, absence de menace sur le maintien dans un état de conservation favorable des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle et justification de la dérogation pour l'un des motifs pouvant l'autoriser. Or, en l'espèce, juge le tribunal, le préfet n'a pas apporté de précisions sur l'importance et l'étendue des dommages subis par les exploitations agricoles qui auraient pu justifier une dérogation. Il n'a pas non plus démontré que cette destruction ne remettrait pas en cause le bon état de conservation de l'espèce dans le département, pas plus qu'il n'a examiné le critère relatif à l'absence de solutions alternatives satisfaisantes.

« La destruction systématique d'animaux considérés comme nuisibles aux intérêts de quelques-uns n'est pas acceptable. Des alternatives existent pour permettre une cohabitation plus sereine entre les activités humaines et la faune sauvage », réagit la LPO. Pour l'association Bretagne vivante, qui conteste également de tels arrêtés devant les tribunaux, « le cas du choucas des tours est emblématique car l'abattage de milliers d'oiseaux par an ne résout rien, mais les quotas ne cessent pourtant d'augmenter… ». Selon les associations, c'est l'évolution des pratiques agricoles qui a permis l'explosion des populations. « Avec le développement des cultures intensives, notamment du maïs, au détriment des prairies, 1 % des grains reste sur le champ, après récolte. Cela constitue une aubaine pour les espèces opportunistes comme le choucas », explique Jean-Pierre Roullaud de Bretagne vivante.

Un autre jugement est attendu sur un arrêté du préfet du Finistère autorisant la destruction de 12 000 choucas dans ce département. « Cette décision intervient deux semaines après la suspension d'un arrêté préfectoral autorisant la destruction de 350 grands cormorans en Haute-Loire », rappelle également la LPO.

Tag(s) : #Environnement, #Nature, #Faune
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