Sauf que le plan automobile dévoilé par Emmanuel Macron le 26 mai n’a fait que raviver une dépendance déjà très forte à la voiture individuelle. Malgré une tentative de verdir la relance économique de ce secteur en encourageant la production de véhicules électriques, le gouvernement ne prend toujours pas les mesures qui permettront de mettre cette industrie en cohérence avec le défi climatique. Une grande partie des huit milliards d’euros de ce plan automobile est dédiée à des primes à l’achat d’un nouveau véhicule, même s’il roule au diesel ou à l’essence. Par ailleurs, il faut souligner l’impasse totale faite sur la question des SUV. Alors qu’ils sont la deuxième source de croissance des émissions de CO2 depuis 2010, le gouvernement n’impose rien aux constructeurs automobiles pour qu’ils diminuent la production de ces véhicules plus lourds et plus polluants. Pire, ils sont eux aussi éligibles aux aides à l’achat, que sont la prime à la conversion et le dispositif de bonus / malus !
Penser la relance du secteur des transports de manière compartimentée, secteur par secteur, révèle une vision étriquée et un manque de courage de la part des responsables politiques sur la question des transports. Il est nécessaire de profiter des différents plans de soutien pour insuffler une nouvelle dynamique, encourager des changements de comportements, développer et rendre accessibles des solutions de déplacement qui ne sont pas la voiture individuelle. Elles existent et elles sont nombreuses. Plutôt que de servir à l’achat de nouvelles voitures et financer le dérèglement climatique avec de l’argent public, les milliards d’euros injectés dans l’économie devraient permettre de développer les mobilités douces, les mobilités partagées et les transports en commun à une plus grande échelle.
Quelles solutions pour se passer de la voiture en ville ?
Le vélo
Pendant la période du confinement, très rapidement, de nombreuses pistes cyclables temporaires ont vu le jour dans les villes. Le vélo permet de se déplacer en respectant la distanciation physique, tout en évitant de prendre sa voiture en solitaire. La dynamique de développement du réseau de pistes cyclables dans les zones urbaines s’est considérablement accélérée, et tout l’enjeu est maintenant de pouvoir les pérenniser. Les cyclistes semblent être au rendez-vous : à Paris, par exemple, des records d’utilisation sur les pistes cyclables ont été constatés depuis le déconfinement.
La surprise la plus agréable est que cela ne concerne pas uniquement les centres-villes : les territoires ruraux et périurbains connaissent eux aussi une envolée de l’utilisation du vélo, notamment grâce aux vélos à assistance électrique.

L’essor de la petite reine ne repose pas uniquement sur la bonne volonté des citoyen·nes. Cela nécessite aussi des décisions politiques fortes de la part des élu·es locaux et nationaux pour encourager cette pratique. Créer des pistes cyclables implique de rogner l’espace qui était jusqu’ici réservé à la voiture, le plus efficace étant de développer des réseaux express vélo, qui desservent les villes-centres et les banlieues avec des pistes directes, sécurisées et continues, et qui permettent ainsi d’inciter les cyclistes à parcourir de grandes distances rapidement, avec le maximum de fluidité, le minimum d’obstacles et d’arrêts. C’est imposer, petit à petit, une autre vision des transports. Cela demande des moyens financiers et du courage politique, alliés à une vision à long terme répondant aux enjeux climatiques. Au-delà des pistes cyclables, c’est tout un “système vélo” qu’il faut mettre en place, par exemple en développant l’apprentissage du vélo pour tous et toutes, avec un bon service de location vélo, des stationnements sécurisés, des ateliers de réparation, une intermodalité efficace avec les transports en commun…
La marche
Avec le vélo, la marche à pied est une des meilleures manières de se déplacer sans polluer, notamment en ville où près de la moitié des déplacements en voiture sont inférieurs à trois kilomètres. Cela suppose là encore que les élu·es priorisent la sécurité des piétons au tout-voiture et rendent la marche plus agréable en ville. Un vrai plan piéton doit être mis en œuvre, notamment par le développement de zones de circulation apaisées et de zones piétonnes. Récemment la question de la mise en place de “rues scolaires” (qui permettent de restreindre voire de suspendre la circulation automobile durant les heures d’entrée et de sortie d’école, et possiblement sur des plages horaires plus longues) a émergé dans le débat public et c’est un exemple concret de ce que peuvent et devraient faire les élu·es locaux.
Les transports en commun
Même si la période pose des questions sur l’utilisation des transports en commun et nécessite des dispositifs spécifiques pour y garantir la sécurité sanitaire, leur développement n’en reste pas moins essentiel pour avancer dans la transition écologique et pour diminuer l’emprise de la voiture en ville. L’offre de transports en commun (RER, métro, tramway et bus) doit répondre aux attentes de la population et être attractive et accessible à tous.tes. Ce n’est malheureusement pas encore le cas partout, comme nous l’avons récemment montré dans le classement des 12 villes françaises en matière de lutte contre la pollution de l’air.
